[Mission de Rang D] Throught the Never !

« Et tu aurais du voir la performance d’Yusaku Matsuda, c’était juste énorme ! »

Eizo se revoyait encaisser les mots de son meilleur ami alors qu’il s’épongeait le visage d’une serviette. Leur entrainement dans les installations du Nexus avait, une nouvelle fois été violent et impitoyable au possible, les deux meilleurs amis s’étant livré une lutte acharnée au centre de l’octogone pour soumettre à l’épreuve de la force leurs techniques de combat rapproché. Les styles vifs et stiffs des deux adversaires donnaient, généralement, un beau spectacle qui aurait bien pu s’afficher comme le Main Event de n’importe quel rassemblement de combattants clandestins. Et une nouvelle fois, pas de vainqueur et un match nul !

Singeant une moue désespérée devant toute la passsion apparante de son meilleur amie pour sa nouvelle passion du théâtre, Eizo cherchait intérieure des mots pour mettre en forme sa pensée profonde : il n’en avait strictement rien à foutre ! Et surtout, surtout, il connaissait trop bien ce charmeur de Punk pour savoir à l’avance qu’il y avait encore une histoire de femme là-dessous. Ce brigand de Burukku était tout à fait capable de jouer un rôle bien différent de sa personnalité propre pour manœuvrer habilement dans le but de mettre une femme dans son lit. Et force est de constater qu’il était aussi habile en Taekwondo qu’à ce petit jeu là …

Amusé, Eizo imaginait déjà la scène : un Punk vêtu autrement que de ses sempiternels habits d’entrainement se mettant un monocle et amenant une pulpeuse jeune femme en fleur à son bras vers une théatrale représentation entrecoupée de morceaux d’Enka. Elle dévait avoir une véritable plastique de rêve pour justifier tous ces efforts et le simple fait d’imaginer Burukku coincé de longues heures dans une pièce sombre à subir des dialogues dont il ne retiendrait qu’un mot sur dix pour finalement discuter technique de représentation avec sa belle dans l’idée que la chevaucher ensuite amusait énormément un Eizo moqueur.

« Tu ne mécoutes pas là… »

« Si. Mais je te connais par cœur, crétin ! Tu fais tout ça pour impressionner une pauvre fille qui a flashé sur ta petite gueule alors que t’as juste envie de la retourner dans ton lit ! »

« Oui… Mais cette fois c’est différent ! »

« Me la joue pas j’ai des sentiments ! T’es pas le genre à… »

« Non, non, non ! Je veux dire que c’est différent parce que c’est une coriace… »

« C’est sur que pour te forcer à aller au Théatre ! »

« Pas ma faut si c’est l’Agent de ce Yusaku Matsuda ! Ok, il parle fort et il incarne bien, mais pas de quoi fouetter un chat non plus… »

« Bon, accouche ! Je connais ce ton et à chaque fois que tu le prends en mutipliant les détours c’est irrémédiablement pour me demander quelque chose… »

« Han~~ ! C’est ce type là ! A force de jouer les Bretteurs il se prend pour un Samurai et il vadrouille comme un Ronin dans le Grand Port. Faudrait que quelqu’un le remette en place, lui fasse comprendre que c’est qu’un acteur quoi… Quelqu’un qui manie le sabre… Et qui peut rien refuser à son vieil ami… »

« Tout ça pour que tu puisses ensuite fanfaronner en disant que c’est de ton fait ? »

« Exactement ! 200 Ryos pour toi si tu le fais ! »

« 250… »

« Adjugé ! »

Le poing fermé de Punk dans les airs, en signe de victoire, finit de désespérer plus encore le Bretteur de la Brume qui se demandait déjà pourquoi il avait accepté ce petit boulot sur son temps libre… Un temps libre qu’il aurait préféré passé dans les bras de Mei à manger des fruits en distribuant des caresses par exemple. Cette simple pensée ne lui ressemblait pas mais tout l’amour qu’il pouvait porter à Mei modulait peu à peu son comportement et le rendait un brin plus suaves envers sa douce et toujours plus protecteur et agressif envers ceux qui osaient s’approcher de trop près d’elle.

Baillant ostensiblement en quittant le centre d’Entrainement du Nexus, Okamura essaya de garder en tête les derniers dires de Punk, qu’il était necessaire de ne pas âbimer le pauvre acteur. Tempérance et retenue seraient donc les maitres mots d’un affrontement où Eizo ne pouvait s’imposer que comme un vainqueur total. Restait à contenir toute la violence et la volonté de donner la mort découlant de son si particulier style de combat rapproché. Quittant le village avec l’impression de s’être fait, une nouvelle fois, manipuler par ce grand faisandier de Punk, le dernier Okamura entra donc dans une course folle parcemée de bonds nombreux et amples pour couper court à son voyage et en finir au plus vite avec cette mascarade de Mission qui venait de s’improviser.

Le Grand Port était toujours bondé et c’est entre les pêcheurs cherchant à vendre leur poissons à la criée que le Jinchuuriki se mit à déambuler, tenant en main une affiche de théatre où se peignait le portrait de sa cible qu’il entreprit de trouver. Autant chercher une aiguille dans une meule de foin … Soupirant alors qu’il passait devant le Bar récement détruit dont on entreprenait déjà la reconstruction, Eizo laissa son esprit dériver sur une vision tactique de la parodie de combat à venir alors que son sens auditif cherchait à capter des bouts de conversation qui pourraient lui être utile dans sa quête.

Ne pas abîmer la cible étant à l’ordre du jour, il serait donc nécessaire qu’Eizo ne touche pas de sa lame les chairs du comédien tout en s’assurant une démonstration de force et de talent succeptible de lui faire immédiatement abandonner la voie du Sabre pour s’en retourner vers ses première amours : la comédie ! Songeur, il pensait donc à agir avec la force du Tigre, la majesté du Dragon et la précision du Scorpion. Un savant mèlange à même de laisser ce Yusaku Matsuda seul face à son incompétence et sa honte. Une succesion de mouvement germait dans l’esprit tordu d’Okamura quand il entendit en substance un vieux vendeur d’anguille se plaindre du comportement excécrable d’un Epeiste au teint hâlé dans le quartier des videurs de poissons.

S’excusant poliment lorsqu’il bouscula un des acheteurs, Eizo interrogea consciencieusement le vieillard alors qu’il lui préparait une brochette d’anguille. Sa faim assouvie et sa soif d’information étanchée, il remercia chaleureusement le vendeur et prit la direction des quartiers où émanaient les fragrances les plus nauséabondes du Grand Port. L’odeur de trippe de poisson imbibant maintenant ses vètements, le dernier Okamura ne put s’empècher de maudire son meilleur ami pour ses idées stupides et son sens de la séduction tiré par les cheveux. Au moins avait il trouvé l’acteur et le moins que l’on puisse dire c’est qu’il dégageait de lui une certaine allure. Aussi direct et immédiat qu’à son habitude, Eizo entama donc ce qu’il espérait être une courte discussion :

« Yusaku Matsuda ? »

« Ooooh ~~ Vous devez faire erreur jeune homme ! »

« Vous êtes Yusaku Matsuda… J’ai même une affiche à votre nom… »

« Il est vrai qu’autrefois l’on m’apellait ainsi… Mais depuis ma vie n’est plus que charnier et méditation sur la voie du Sabre ! »

« Faut arrêter là ! Vous êtes juste un acteur qui a manqué ses deux dernières représentations parce qu’il se prend pour un autre … »

« Ne provoquez pas le buffle, jeune homme, vous risqueriez de vous faire encorner ! »

« Faut se remettre les pieds sur terre mon gars... Suffit de vous voir pour comprendre que vous maniez aussi bien le sabre que moi je sais cuisiner! »

« Il suffit ! Je ne vous laisserai pas insulter plus longtemps l’honneur d’Usagi Yojimbo ! »

Immédiatement, l’acteur se mit en garde et celle-ci fit sourire Eizo tant elle était médiocre voire même nulle ! La toute base du maniement du sabre, à savoir l’équilibre, n’entrait même pas en compte dans la posture de garde de son adversaire et ce dernier laissait son sabre au fourreau à la manière d’un utilisateur d’Iaijutsu. S’en était encore plus pathétique que tout ce à quoi le Jinchuuriki de Rokubi aurait bien pu penser ! Désabusé, il se livra donc à une parodie de salut et se saissit de son fourreau sans toutefois encore porter la main à la poignée de sa seule lame à disposition. Shuusui Kitetsu encore confortablement installée dans un meuble des appartements de Mei, le dernier Okamura en aurait presque oublié comment manier deux lames à la fois avec le temps.

Le premier assaut de son adversaire fut à l’image du physique de l’acteur : clinquant mais vide de force ! La frappe était molle et manquait clairement d’une conviction assumée de tuer qu’un donneur de mort de la trempe d’Eizo était capable deceller dans la simple aura de son adversaire. Il habitait peut être parfaitement son rôle sur les planches, mais la réalité du terrain laissait le comédien comme un bien piètre manieur de sabre sans aucune technique ni même volonté. Il renvoyait la détestable image d’un homme qui bafouait l’honneur et la fierté de toute une classe de combattant. Le genre d’attitude qui, d’ordinaire, suffisait à faire sortir le Bretteur de la Brume de ses gonds en lui faisant voir rouge et en lui intimant de goutter le sang !

La seconde passe fut tout aussi pathétique que la première, le pauvre comédien laissant des ouvertures béantes dans ses assauts qu’un adversaire au minimum préparé saurait exploiter pour lui faire rendre gorge. La troisième frappe fut du même acabit et trahissait toute les lacunes d’un homme qui n’avait clairement pas les épaules pour le rôle qu’il comptait assumer. Le costume était trop grand pour lui et c’est de son sabre au fourreau que le Bretteur dévia le coup de ce triste clown qui s’agitait toujours devant son regard vermillon.

« Je croyais voir un sabreur de renom et je tombe sur le plus pitoyable opposant de ma carrière ! Qui que vous soyez… Vous êtes tout petit ! »

Le visage d’Eizo ne fut plus qu’un unique masque sadique alors qu’il étirait un sourire malsain. La lame de son premier Katana quittait lentement le confort de son fourreau pour scintiller à la lumière du jour et se faire menaçante au possible. Son adversaire apparaissait comme infiniment plus lent que lui et c’est avec une facilité déconcertante qu’Eizo parvenait à lire dans son jeu, à voir ses mouvements et à réagir en conséquence. Il n’était même pas nécessaire d’être l’Elite Kirienne pour vaincre ce pauvre type…

Il vit donc la lame fondre vers lui et c’est dans un geste spectaculaire que le Porteur de Rokubi envoya sa propre lame pour contrer. Le fil de son arme glissant sur le plat de celle du banal acteur, la force mise en jeu par Eizo fut à même de délivrer une gerbe d’étincelles dans les airs et dans un coup de poignet sauvage, le Disciple de Shiliew fut à même de briser la lame adverse à la base de la garde pour laisser le pitoyable sabreur comme simple victime à ses prochaines actions.

Laissant sa lame décrire un moulinet dans les airs, Eizo entreprit de passer à l’offensive pour définitivement détourner son adversaire de la voie du sabre. Après sa démonstration de puissance, il allait lui faire l’éloge de la précision comme de la vitesse et pour se faire il saissit sa lame comme s’il s’apprétait à amorcer une foule de coups d’Estoc. Le tranchant de la lame d’Eizo s’anima alors pour venir lécher de son fil les coutures de l’ample tunique que portait l’acteur talentueux, découpant chaque couture pour laisser son adversaire immobile et transit de peur découvrir avec horreur qu’il était maintenant privé de ses vêtements et se trouvait donc en sous-vêtement dans un quartier du Grand Port. Visage menaçant et attitude intimidante peignant son langage corporel, le redoutable Bretteur de la Brume s’adressa alors à son pitoyable opposant sur un ton plus froid encore que les profondeurs insondables de l’Océan :

« Tu n’es rien… Rien du tout sur la voie du sabre ! Et tu n’as rien qui puisse t’y faire avancer. Ni talent, ni volonté… Il est des voies qui ne sont pas disponible à tous les êtres humains ! Alors retourne t’en vers ta véritable vie… Yusaku Matsuda ! »

L’homme semblait bien avoir assimilé le poids des mots de celui qui venait de lui infliger une véritable humiliation publique et qui aurait bien pu lui ôter la vie en un instant. Aussi, il prit ses jambes à son cou ne manqua pas de crier alors qu’il disparaissait dans une rue perpendiculaire. Ce soir, il se produirait à nouveau sur les planches… Songeant à son ami Punk qui lui avait infligé ce travail ingrat, Eizo se dit que 250 Ryos pour un tel ennui s’était définitivement trop peu. Mais il n’était pas vraiment du genre à arnaquer un ami. Le plus dur, en réalité, serait de s’en retourner vers Kiri… Mais la perspective de retrouver les bras comme les lèvres de Mei n’était rien d’autre que le plus grand facteur de motivation à même de décupler sa vitesse !