.: Through The Glass :.

Le jour n’est pas loin, je peux distinguer au loin les faibles lueurs rougeâtres marbrées de rose et du teint flamboyant qui colore de temps à autres les multiples âtres réchauffant les foyers désormais endormis de ce monde où je reste coincé. Le jour n’est pas loin et pourtant je n’ai pas encore fermé l’œil de la nuit. A défaut, mon estomac ne cesse de se retourner sous ma paroi abdominale, ballonné comme une bouteille vide roulant sur le pont d’un navire agité par le roulis des vagues déclenchées par une tempête nommée l’ivresse. Je n’ai toujours pas dormis et je ne dormirai probablement pas en cette morne soirée froide et qui est restée voilé pendant de trop longues heures par une voute nuageuse aussi morne que grise masquant l’éclatant scintillement des étoiles figées dans les cieux d’encre d’une nuit que je n’ai pas pu gouter. A défaut, j’ai bu plus que de raison, comme souvent … A-t-on idée de boire autant quand on tient autant l’alcool ? En boire autant à s’en rendre malade … J’avais besoin de déconnecter mon esprit de ce monde qui, ces derniers temps, m’a plus affligé qu’il ne m’a aidé à aimer. Les récent événements que j’ai vécu au bras de cette donzelle en aurait ravi bien d’autres à ma place, mais je ne suis pas les autres, je suis ce monstre de complexité qui autrefois ferma son cœur aux sentiments de ce monde pour devenir un arme froide et qui avait du perdre les êtres qu’il chérissait le plus pour enfin vivre sa propre vie. Je pensais n’avoir plus droit à vivre de telles sensations, découvrir comme cela réchauffe d’avoir des sentiments et affirmer que ce n’est pas mieux de vivre sans … Fermer les yeux et voir son visage, respirer l’air alentour et espérer sentir son parfum. Pourquoi tout çà me faisait il si mal ? Pourquoi avais-je donc l’impression qu’une lame s’enfonçait profondément dans mon âme à la moindre de mes pensées orientée à son souvenir ?

Je ne savais que trop bien pourquoi …

Même si c’était lointain, ces sentiments là restaient trop vivaces et la blessure n’avait pas totalement cicatrisé. Je n’étais apparemment pas encore prêt à être apprivoisé et ne le serais probablement jamais sur ces terres. A défaut d’avancer, je restais là, seul dans étable sombre, debout à regarder mon reflet, dans cet abreuvoir, floué par l’action malsaine de tout l’alcool ingéré. Je me dégoutais … Et une nouvelle fois je me penchais pour déverser les relents de cette soirée trop arrosée dans un gargouillement atrocement vomitif. Haletant, essayant de ne plus trembler en m’appuyant sur une craquante clôture, je relevais mon regard vers mon reflet floué et un brin déformé. Mon bandeau rouge ne cessait de se dénouer …

Les tourments de l’ivresse m’envahissent de nouveau et je m’égare une nouvelle fois dans les méandres de la pensée et du temps. Des images contradictoires partent à l’assaut de mon cerveau, celles d’une jeune femme à la peau blanche et aux iris aussi chatoyants que des pétales de roses alors que l’instant suivant c’est le visage d’une femme que je pensais avoir oublié qui assaille mes sens, me forçant à prendre ma tête dans mes mains, veine tentative d’éloigner ce fantôme du passé qui menace mon présent et fait saigner mon âme. Ne reviens pas … Pas maintenant ! Je ne peux pas guérir de toi si tu assaille ainsi mon âme ! Arrête ! Tu sais pourtant que je t’aime, que je ne cherche pas à t’oublier, juste à panser mes plaies … Je t’en prie, restes où tu es … Dans mon cœur ta place est restée … Et voilà qu’une nouvelle fois mon cerveau s’emballe alors que ma vue se trouble. Je la revois, elle, ses bras blancs entourant un couffin sombre qui réchauffe et sécurise un petit bout de choux, un bambin souriant qui nous ressemble étrangement … Un bambin souriant dont je sais être le père ! Pourtant je n’ai aucun désir d’être père !!! Enfin, je crois … C’est pourtant la constante que mon esprit projette cette paternelle image de moi. Tout çà … Je le voulais autrefois … Mais plus maintenant ! Enfin, je crois … Mais je les aime tant cependant. Quel Bordel dans ma Tête ! ! ! C’est de rage que je détache mon esprit de son état d’ébriété pour envoyer mon poing s’écraser sur terne surface du mur qui me fait face, faisant se redresser les Taureaux de Combat endormis à mes côtés. Mon poing saigne, mon âme pleure et bien que seul je ne trouve rien d’autre à faire que de murmurer quelques mots avant de m’affaler sur le sol glacé.

« Va être temps de rentrer chez moi … »

‘Chier … Où est ce que je suis maintenant ? La boue qui parsème mes genoux et qui séché progressivement dans mes cheveux m’indique bel et bien que je ne suis plus dans ma confortable étable. Je savais que boire n’était pas la réaction la plus appropriée … ‘tain voilà que je tremble de froid et de fatigue maintenant … Ah … Le fait que je sois à poil y est peut être pour quelque chose ! Dans quoi me suis-je encore fourré ? M’appuyant sur mes bras tremblants, je remarquais vite que je me trouvais non loin d’un bar, comme par hasard … Ma vue fut bientôt coupée par les mèches tombantes de mes cheveux mêlés de boue. Où pouvait bien être ce foutu bandeau ?!

A défaut d’une étoffe rouge sang, ce que je vis se refléter à la surface ridée de cette flaque boueuse me glaça d’effroi. Pas toi … Non ! Ne reviens pas encore ! Laisse moi tranquille, je commençais à aller mieux, le souvenir de mon ivresse m’avait fait t’oublier pour un instant … Cesse de me torturer, je t’en prie ! Encore une fois je ne cherche pas à t’oublier … Quand comprendras-tu cela ? Je ne suis pas de ceux qui cherchent à retourner ciel et terre pour ramener à la vie une personne qu’ils ont tant aimée … Tu sais très bien que je ne suis pas homme à se laisser guider dans la folie, mais bien de ceux qui pensent que les souvenirs de jours heureux sont impérissables et qu’ils restent ancrés dans nos chairs jusqu’à ce que la mort nous en sépare ! Alors je t’en prie … Laisse moi essayer de vivre sans toi … Ton souvenir m’oppresse autant que l’image de ma fille abandonnée me hante ! Laisse moi juste guérir de toi … Je n’en peux plus de çà et je suis prêt à briser mes phalanges contre le mur blanc auquel je tourne le dos, le poids de mes souvenirs m’oppressant plus que l’aura de terreur inspirée par l’ensemble de mes ennemis … Je suis sur le point de réduire mes doigts en un amas d’os et de chairs ensanglanté au contact de la pierre quand un vif éclat me tire de ma torpeur et une voix m’extrait de ce monde silencieux. Pourquoi ce foutu Taureau me regarde comme çà ? J’ai l’air tellement stupide là ? C’est çà ?! Pourriture de Ruminant … Quoi que t’as raison mon petit gars … J’ai plus à me lamenter sur mon sort. J’arrête de chialer comme un héro de mélodrame et j’embrase ma destinée pour transcender ma condition humaine. Il est grand temps de retrouver mon Village …

Par tous les moyens !

Je vis en un instant une part importante de mon fardeau me quitter pour rejoindre les lointains limbes de l’oubli qui tapissaient les sombres recoins de mon cerveau. J’accueillis les premières gouttes de pluies, me relevant entre les gouttes qui terminaient un long travail de dégrisement. Le gros de la gueule de bois était bien passé … Un rayon de soleil perça alors les nuages sans pour autant que la pluie ne se soit arrêtée. Cette lueur blafarde vint auréoler ma silhouette nue d’un manteau d’intervention céleste alors que la pluie et la lumière pleuvaient désormais en même temps. Comme si des cieux on versait un torrent de lumière pour bénir et approuver mes nouvelles intentions alors que la nature versait des larmes de compassion pour apaiser la souffrance qui nichait dans mon cœur. Si ce ciel avait su que mes intentions étaient toutes sauf louables, m’aurait il ainsi nimbé de lumière ?

C’est donc entièrement nu que j’entrais dans le bar, laissant le silence suivre ma musculeuse silhouette alors que d’admiratifs regards se posaient sur mes muscles saillants. Je repérais un autre mec assez bien taillé, armé et avec des fringues qui en jetaient assez. Et surtout la gueule du type pas assez charismatique pour être un chef mais suffisamment borné et sans morale pour faire un bras droit de premier ordre et un potentiel informateur à même d’aiguiller mes recherches suivantes. Faut dire que je n’étais pas là par hasard non plus, ce vieux vicieux de Lyoto avait fait un boulot plutôt correct pour lui renseigner les dernières positions de sa cible actuelle. Restait maintenant à soutirer les informations utiles … C’est donc en croisant les bras que je me figeais devant son regard médusé, lui adressant quelques mots d’un ton neutre qui puait pourtant la menace.

« Je veux tes vêtements, tes thunes et tout ce que tu sais sur Kumojin … »

Venant d’un mec à poil s’était plutôt ridicule et ça pouvait bien faire éclater de rire l’ensemble du bar … Mais Il était temps de reprendre les choses en main !