Femme d'une et dernière nuit

La pluie battait son plein contre la chair fraîche et affaiblie de notre belle kunoichi. Elle tenait péniblement de sa main gauche un flan blessé d'où s'écoulait un sang toxique pour quiconque s'aventurerait à vouloir le toucher. Elle titubait légèrement, ses lèvres pincées, ses dents serrées, ses sourcils froncés, elle s'éloignait le plus rapidement qu'elle pouvait de l'hôtel dont elle venait de sortir, à peine vêtu d'une robe blanche teintée de sa propre vie. A cinq cent mètres, elle se stoppa et tourna une nouvelle fois à l'angle d'une rue, cognant lourdement son dos contre le mur auquel la belle s'adossa, elle ôta sa main de sa blessure et observa les dégâts du coup de poignard qu'elle avait pris au niveau du ventre. Il n'y avait pas de quoi s'inquiéter tant qu'elle parvenait à arrêter l'hémorragie et qu'elle trouvait les forces de rapidement s'éloigner du lieu de son crime.

Elle ne devait pas laisser trace de son sang sur le sol et la pluie qui coulait se faisait bonne aide pour cela. Attrapant le pan de sa robe, elle en déchira un large bout, baissant le bustier léger pour accéder à sa plaie et improviser un bandage sommaire mais vitale pour qu'elle puisse aller plus loin. Elle serra d'un coup sec et laissa échapper un petit cri étouffé avant de doucement remonter le bustier sur sa poitrine. Elle respirait fort et son coeur tambourinait férocement contre ses tempes.
Ce n'était plus l'heure de jouer, le cadavre allait bientôt être retrouvé et une battue serait rapidement mener dans les petites rues de ce petit village de bordure de route. Elle n'avait pas le temps de se reposer et de traîner plus longtemps, de plus les hommes de sa victime connaissait déjà sa carrure et la couleur de ses cheveux, il n'y avait pas de doute sur le fait qu'ils feraient rapidement le rapprochement entre le cadavre, la belle rousse et sa blessure.
Il était rare que Saseko prenne des dommages dans ses missions mais cette fois-ci notre homme n'était pas mort sur le coup, elle n'avait pas relâché suffisamment de poison et tandis qu'il s'étouffait, il en avait profité pour attraper son arme et la poignarder juste assez pour qu'elle ne puisse qu'envisager la fuite sans possibilité de se débarrasser du corps comme elle en avait l'habitude.

Elle avait doucement repris son chemin, une main posée sur le mur comme appui, l'autre toujours sur son flan comme pour éteindre la douleur sous sa peau. Elle inspira un bon coup, sourcil toujours froncé, elle mordit sa lèvre, gardant sa main sur la blessure et elle se mit rapidement à courir. Il ne lui restait plus qu'une dizaine de minute pour parcourir au moins un ou deux kilomètres afin de maîtriser la distance qui la séparerait de ses chasseurs. La nuit et la pluie serait ses alliées dans sa fuite, elle pourrait facilement trouver refuge. Elle pouvait sentir la chaleur qui montait jusqu'à sa tête, la fièvre envahissait son corps et elle devait se reposer pour récupérer quelque peu de cette nuit agitée et dangereuse.
Elle trébucha douloureuse contre une racine, elle venait d'atteindre la lisière d'une petite forêt relativement dense qui bordait une route de sable vraisemblablement peu empruntée. Se rattrapant à l'écorce, ses ongles se plantèrent légèrement dans ce dernier avant de se retourner, lui faisant rapidement lâcher le bois pour lasser un juron et tomber à genoux au sol, la paume sur le sol terreux mais ne lâchant surtout pas son flan encore vivement douloureux. Sa tête lui tournait et retournait l'esprit, si bien qu'observant la première branche qui apparaissait de l'arbre, elle y sauta comme un habile léopard blessé pour se mettre hors de portée de vue des hommes qui allaient la traquer.

Elle s'allongea. La pluie tombait toujours et notre ange ne pu davantage garder ses paupières ouvertes, les refermant doucement tandis que la menace pouvait surgir à tout moment.

« La pluie incessante lave tout :
La haine, la tristesse, les regrets, et même les crimes.
Le rouge du sang devient maintenant le rouge de l'aube,
C'est la couleur de ce qui est encore vivant ;
La couleur qui annonce un matin d'espoir. »

L'eau, comme toujours, l'apaisait. Si nombre seraient ceux à se plaindre d'être trempés de la tête aux pieds dans les mêmes circonstances, le déserteur ne pouvait qu'apprécier silencieusement ce torrent diluvien. Aussi illusoire que ce soit, il lui conférait une impression de soulagement. La pluie était sa confidente désincarnée et sans avoir à prononcer les mots, il se purgeait le cœur de la croix qui y pesait du poids d'un monde délabré. Une ode à tous ceux qui ont perdu l'espoir. Son indicible peine se lisait dans l'opale de ses yeux mais nul n'aurait pu s'y intéresser tant que ses mèches d'ébène en barreraient la route ; l'humidité les plaquant sur ses traits d'une incomparable finesse, propre aux enfants de sang noble, il poursuivit sans un mot sa sempiternelle marche. Les étapes n'avaient pas été nombreuses et la compagnie peu agréable mais ils touchaient au but car sa destination n'était plus très loin. Seuls quelques pas l'en séparaient et c'était sous cette averse battante qu'il devrait les accomplir. Et même si ces flots fouillaient son âme, il n'en avait que faire. Cette onde aquatique était purificatrice et être en harmonie avec elle le rappelait une fois de plus cette sensation qu'elle lui donnait à chaque fois de l'absoudre de ses pêchés. Mais ce n'était qu'un soulagement passager une fois de plus, et il savait désormais que sitôt la dernière goutte tombée, il devrait à nouveau endosser le poids de cette croix qu'il s'était lui-même forgé avant d'en suivre le chemin sans attendre. Son passé était sa couronne d'épines et les troubles qui y avaient élu domicile le sang lui coulant dans les yeux depuis ses chairs lacérées par ce piquant couvre-chef.

Son jugement n'était obscurci que par une peine indicible, celle dans laquelle quiconque pouvait être précipité en se contentant de le regarder en face. Ses pupilles, malgré leur coloris laiteux, n'en étaient pas moins d'une profondeur abyssale et une fois passé le choc de leur inhabituelle couleur, s'apparentaient au lit d'un lac profond... D'une étendue d'eau à la blancheur inadéquate et a la clarté usurpée. Il ignorait quel hasard l'avait mené en ses lieux, se contentant de suivre un instinct régi par l'animalité. Il avait beau se morfondre sans cesse, il n'en était pas moins un guerrier et en possédait ainsi tous les atouts. Outre tout sens de l'orientation, il était pourvu d'une intuition lui faisant entendre le sens qu'il devait donner à sa marche, et en ce jour sa perpétuation l'avait conduit en ces lieux sans qu'il ne sache ce qu'il avait à y faire. Serait-ce une erreur ? C'était fort peu probable. Tout endroit qu'il avait foulé au pied au cours de ces dernières années et depuis son exil avait été la scène d'un événement dont le destin l'avait choisi pour être le témoin. Aucune raison ne justifierait que celui-ci fasse exception. Et cette pensée se confirma quand il eut la curieuse surprise de voir une femme se dénuder grandement en pleine rue, se croyant à l'écart de toute compagnie humaine sans doute, afin de panser une plaie qui manqua de le faire sourciller. Bien qu'ignorant la manière dont elle avait pu s'entailler de la sorte, la profondeur apparente de la blessure laissait présumer que sa seule personne n'aurait pu en être coupable.

L'intrigue s'empara de lui et le ténébreux ne put s'empêcher de la prendre en filature en toute discrétion. Si son nouveau centre d'intérêt brillait par une vitesse et une agilité féline, lui n'avait rien à envier aux ombres en terme de dissimulation, s'y mêlant sans peine pour ne rien laisser deviner de sa présence. Conserver une distance respectable entre eux en était par ailleurs la clé de voûte, sachant à fortiori qu'au vu de sa fébrilité, il y avait fort peu de chance qu'aucune réaction de rejet ne la fasse agir violemment envers lui s'il s'annonçait trop brusquement. Aussi préférait-il prendre son temps et la suivre sans mot dire, ne se faisant pas remarquer en tirant parti de l'interminable formation l'ayant amené à son niveau actuel après moult supplice à tout jamais gravés dans sa chair sans pour autant y semer des marques apparentes. Mais il avait tout assimilé, il n'en manquait pas une miette, et son camouflage était sans faille – de toute façon, au vu de l'estafilade recueillie par la belle, les chances qu'elle avait de lui nuire efficacement en cas de malentendu étaient amoindries et son grade d'antan le laissait deviner que les risques étaient à priori moindres, bien qu'i ne sache rien des capacités de cette demoiselle endolorie. Se mouvant habilement, Erayn finit par parvenir à la dépasser comme il le voulait à mi-parcours, contournant sa position pour finalement l'attendre dans cette forêt qu'elle semblait vouloir désigner comme étant son refuge provisoire. Il était vrai que sa densité en faisait une cache providentielle. Mais que fuyait-elle ? Le mystère était entier.

Sortant de la pénombre, son éternelle mélancolie peinte sur le visage avec l'adresse des plus grands artistes, le renégat prit garde à espacer ses gestes et à n'être brusque en aucun cas afin de ne susciter aucune pulsion néfaste chez elle. Elle n'avait à l'évidence pas besoin de cela en plus de sa situation actuelle, qui ne devait pas être des plus sympathiques pour qu'elle esquisse spontanément pareille échappée. Aussi se refusait-il à l'abandonner à son triste sort dans un élan d'altruisme qui ne durerait certainement pas, l'histoire lui ayant appris à ne se soucier que de lui-même et de ses souffrances plutôt que d'essayer d'endurer également celle d'autrui sous peine d'être dépassé et de s'y perdre. Mais il n'avait pas dans l'idée de se mêler aux problèmes de l'intéressée, simplement de la soulager de quelques désagréments issus du tumulte dont elle serait vraisemblablement captive. Une fois à proximité, s'avançant avec circonspection, il leva la main vers l'arbre où elle avait trouvé refuge afin de lui tendre un parapluie. Si elle venait à devoir reprendre sa course, nul doute qu'il serait préférable pour sa santé qu'elle n'ait pas à pâtir des intempéries, son corps étant déjà un poids à trainer avec le dommage subi. Lui n'en avait aucune utilité puisqu'il aimait subir les torrents célestes et ce don avait donc plus de chance de lui venir en aide que ce n'était son cas, à lui qui n'en avait eu cure depuis qu'on lui avait fait cadeau de ce modeste présent en guise d'accueil sur ces terres sans qu'il n'en comprenne l'exacte raison.

Qui es-tu ? Demanda-t-il, sans se départir de son calme habituel.

A peine commençait-elle à se laisser aller au sommeil que déjà ses sens en alerte qui apprenait que quelqu'un était tout près, elle n'avait pourtant pas eu l'impression d'être suivi et c'est avec stupéfaction qu'elle découvrit qu'un homme l'observait en bas de l'arbre et lui tendait ce qui devait être sans aucun doute un parapluie. Acte altruiste ou piège? Elle sut lire dans le regard de l'homme qui n'avait rien d'hostile et il n'avait en rien l'air d'un acteur qui saurait cacher des pulsions meurtrières, il était lasse et un air triste ne quittait pas ce visage à l'apparence si tendre. Ses prunelles se posèrent sur lui sans un mot tout d'abord, elle se releva pour se retrouver assise contre le tronc de l'arbre, toujours perchée sur sa branche. N'attrapant pas le parapluie qui lui était inutile, un shinobi ne craint sûrement pas la pluie.

Un petit rictus se dessina sur ses lèvres lorsqu'elle acheva de se mettre en position assise, une main posée sur son ventre où le sang avait de nouveau imbibé le tissu trempé. Elle respira plus fort et s'offrit le luxe de perdre de vue le jeune homme dont la voix résonnait encore dans sa tête tandis que la douleur aurait mérité qu'elle grogna férocement pour la chasser. Son visage levé vers la cime, elle sera les dents, les yeux fermés et expulsa fortement de l'air de son nez avant de reprendre petit à petit le contrôle de sa blessure. L'esprit est plus fort que les sensations.
Son visage le fixa et souriant à moitié sérieuse et moqueuse, elle laissa s'échapper de sa bouche aux airs sucrés et délicieux ces simples paroles qui pouvaient signifier tout et rien à la fois.

" - Un poison. "

L'ambre de ses prunelles était rayonnant d'une lueur farouche qui laissait prévoir qu'elle n'avait absolument pas l'intention de se laisser mourir sur une branche ou encore de se laisser attraper. La rage de vivre y était inscrite, elle avait les yeux des fauves que jamais l'on ne peut dresser et qui connaissent trop bien ce dont ils sont capables pour courber l'échine devant le simple fouet. Elle toussa alors, sa main portée rapidement à sa bouche, elle la retira et observa quelques gouttes de sang dans sa paume, d'un ton maussade, elle parla dans un chuchotis à peine audible pour jurer. " Fait chier... " Rien n'était plus à craindre qu'une hémorragie interne et pour son intégrité, elle devait revenir le plus rapidement à Suna gakure ou trouver au plus vite un médecin capable de panser cette plaie si minime pour une kunoichi mais qui pouvait s'avérer fatale sur une trop longue durée sans traitement adéquate.
Elle ne pouvait donc pas se reposer et devait repartir. La venue du jeune homme avait eu pour mérite de lui apprendre cette information au combien vitale sur l'état de son coup de poignard.

Passant doucement une jambe par-dessus la branche, elle s'apprêtait à descendre dans un saut léger de l'arbre afin de retomber au sol. Seulement même là tout semblait être plus difficile que de coutume. Une paume sur le ventre, l'autre sur l'écorce, son regard posé vers le sol et tout qui se brouillait et qui devenait de plus en plus flou aux yeux de notre jeune fille. Elle n'allait vraisemblablement pas sauter mais tomber car doucement, elle glissa le long de la branche alors qu'on pu voir ses iris qui remontaient vers le haut et n'offraient plus que le blanc de ses yeux de visibles. Alors elle tomba vers le sol où la boue lui offrirait probablement un atterrissage moins douloureux.

Sa proposition ayant été déclinée, le ténébreux fit disparaître son offrande d'un opaque nuage. Quoi de plus coutumier pour un objet invoqué que d'apparaître et disparaître par l'intermédiaire de cette manifestation somme toute assez passe-partout. Nombreux étaient les objets utilitaires de toutes sortes qu'il avait scellés dans un parchemin qu'il emmenait partout en sa compagnie, soigneusement gardé à sa ceinture. Son port lui évitait d'avoir à s'encombrer d'un sac de voyages, et avec lui de son poids et de l'embarras de son transport. Tout le matériel dont il pourrait avoir besoin était ainsi véhiculé par un moyen sensiblement plus compact que pareille fourniture et l'allégeait grandement, même si pour beaucoup, les ustensiles que renfermait le rouleau de papier n'étaient que futilités. À commencer par celui-ci dont il n'avait lui-même pas l'usage, permettant ainsi de se demander ce qu'il faisait à en garder un dans l'un des emplacements prévus à cet effet. Mais la demoiselle n'ayant pas idée de ce stratagème fort pratique, la question ne se posait pas, d'autant plus que lui-même n'en aurait certainement plus le souvenir. Qu'il l'ait perdu ou occulté, le résultat était identique...

La chute ne fut pas plus bruyante qu'un frôlement d'étoffes. Celui produit au rattrapage de la jeune femme afin de lui éviter une douloureuse rencontre avec le sol boueux qui l'attendait quelques mètres plus bas. Le misanthrope n'avait pas idée que les textiles venaient de lui sauver la vie. Par réflexe, il s'était mu à la vitesse de l'éclair – si ce n'est de la Lumière – pour porter assistance à la blessée afin de ne point laisser son état s'empirer. Et pour avoir réagi promptement, il avait bon espoir d'en avoir été capable, bien qu'il n'en serait certain qu'une fois qu'elle-même se serait aperçue de n'avoir pas été meurtrie par son involontaire descente. Et cette réalité ne viendrait que plus vite en la reposant à terre pour qu'elle réalise ne pas l'avoir heurtée. Aussi la posa-t-il à ses côtés, suffisamment près du tronc qu'elle venait de voir défiler que pour qu'elle puisse s'y adosser sans mal afin de maintenir son équilibre précaire. La voir s'effondrer après s'être échiné à lui éviter de se souiller dans ce bourbier serait dépitant, même si Erayn ne ressentirait certainement pas les effets de cette aberration.

Ses sentiments n'étant plus que de pathétiques prisonniers de la geôle de glace enserrant son organe de vie, il n'avait plus à s'encombrer de pareille sensiblerie inutile, même si la déplorer aurait tout de même été dans ses cordes. Poison, avait-elle dit. Pour autant qu'il en sache, si cela avait été le cas, il en serait dès à présent imbibé – le tissu n'y immunisait pas, à sa connaissance. Or, c'était là l'unique rempart entre leurs deux corps au moment de la rattraper. Et à moins qu'une substance nocive se soit instillée dans son organisme à son insu et opère en toute discrétion, il était en parfaite santé. Si maux il devait y avoir, ce n'était pas pour tout de suite. Et même s'il était sans doute quelque peu naïf de prendre cette définition d'elle-même qu'elle avait décrétée au pied de la lettre, il avait appris à se méfier de tels commentaires de la part de shinobi. Car à coup sûr elle en était une, à en voir l'aisance toute relative avec laquelle elle avait entrepris de grimper à un arbre en dépit de sa plaie ouverte à l'abondant saignement. Aussi préférait-il être suspicieux et ne pas se contenter de voir cela comme étant une quelconque métaphore. Au cas où.

Veux-tu t'enfuir ?

La question pouvait paraître anodine mais en dépit de la détresse lisible tant dans l'attitude que dans les prunelles de la venimeuse, certitude n'était pas faite. Déboussolée qu'elle était, y donner réponse uniquement par les actes était improbable tant sa gestuelle était fébrile et désordonnée. On ne pouvait lui en vouloir au vu de l'écarlate dont son estafilade baignait ces terres déjà détrempées, les colorant d'une nuance macabre. Mais si l'interrogation était dénuée de sens autant que d'intérêt, la main qu'il lui tendit fit prendre une toute autre tournure à cette question. Aussi inexplicable que soit ce mouvement de prime abord, il ne signifiait qu'une proposition de complicité. Déjà renégat et en fuite, quelle honte aurait-il à vouloir aider quelqu'un ne rejoignant au final que son propre choix de vie aussi indirectement que ce soit en l'incitant à accepter son aide ? Pourchassée et amoindrie, l'inconnue n'avait guère la liberté de cracher sur un soutien ponctuel. Certes, pour ne point le connaître, douter de ses ambitions était possible. Mais entre finir sans délai entre les griffes de ses poursuivants, où son sort serait déjà scellé, et se risquer à la fuite en compagnie d'un parfait inconnu, quelle solution était la pire ? C'est dans cette optique qu'il lui avait fait cette suggestion n'attendant que d'en percevoir la réponse.

Elle pensait choir dans la boue alors qu'elle ne fut pas surprise d'être recueillies par des bras d'homme mais à peine son regard se relevait-il vers lui qu'elle reposait déjà contre l'arbre, debout adossé à l'arbre tandis qu'elle reprenait le rythme d'une respiration normal et où ses iris venaient se fixer clairement sur le jeune homme. Lentement elle le détermina de son doux regard, elle aurait aimé rester un peu plus longtemps dans les bras chaud et réconfortant dans lesquelles elle s'était retrouvée l'espace de quelques instants.
Puis la douleur du choc parvint enfin à son esprit, ses prunelles se délièrent de celles du beau ténébreux pour se fixer sur son ventre sur lequel elle posa instinctivement sa main on appuyant légèrement. Un rictus s'était étalé sur son visage tandis qu'elle respirait avec plus de difficulté une nouvelle fois et dans sa tonnait des maux qui lui apportaient la fièvre.

Sans attendre davantage que la douleur ne s'amplifie et qu'elle ne puisse plus rien faire, elle déchira à nouveau longuement sa robe la laissant lui arriver sous les genoux et elle enroula le tissu autour de sa taille avant de serrer d'un seul coup avec vigueur et de lâcher un petit cri étouffé. Son cœur s'était emballé sous le coup et elle posa une main sur l'arbre, la sueur coula de son visage faible et fatigué aussi la main qu'il lui tendit et les paroles qui les accompagnèrent parurent beaucoup trop belle pour être vrais.
La belle observa la main puis le visage du jeune homme successivement et à plusieurs reprises. Elle n'en croyait pas ses oreilles, venait-on vraiment de lui proposer de l'aide alors qu'elle ne ressemblait plus à rien. Son teint était pâle, ses lèvres avaient perdu du rouge qui les rendait si désirable, elle baignait de sang ses vêtements, la pluie l'avait trempée jusqu'au os et son front transpirait suite à sa fièvre. C'était bien là une main tendue inespérée, était-elle tombée sur un ange? Un ange aux yeux torturés qui lui proposait une délicieuse échappatoire.

Elle ne put s'empêcher d'attraper la main de ses doigts fébriles et gelés par l'eau. Se servant de cette dernière comme d'un appuie, elle se jeta presque sur lui ou plutôt trébucha en titubant pou rejoindre tout le corps qui était relié à cette main. Elle entendait déjà les chiens qui aboyaient, dans quelques minutes ils seraient ici, il la trouverait et lui ferait subir la torture pour lui faire avouer le nom du commanditaire. Apeurée, elle sera la main fermement et plongea son visage dans le torse qui lui faisait face y collant son front tandis qu'elle sentait déjà ses forces la quitter à nouveau. Ses ongles s'enfoncèrent dans la peau du bellâtre sauveur et elle s'accrocha doucement à lui comme dernier rempart à sa survie. Il fallait savoir accepter l'aide quand aucune autre solution ne se présentait.

" - Oui... S'il-te-plait... "

Elle ne releva pas son visage vers lui, préférant éviter tout échange de regard pendant qu'elle acceptait son offre en posant de côté sa fierté et son orgueil qui ici n'avaient pas lieu d'être. La pluie battait toujours son plein et ses cheveux trempés collaient sa peau et tout ce qui les touchait, son corps était froid sauf son visage où elle avait a contrario les joues rougies.

Femme d'une et dernière nuit

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